« Marie-Louise se souvient que sa grand-mère le lui racontait chaque année. Alors, chaque 1er Janvier elle le raconte aussi à ses six petits enfants.

A Haïti, dans toutes les familles, on se souvient qu’ici, avant d’être des citoyens libres on était des Noirs, résignés et esclaves.

On se souvient de la colère qui a mijoté à petits bouillons avant de déborder de la marmite d’eau salée dans laquelle on n’avait ni viande ni légumes à jeter.

On se souvient de Toussaint Louverture qui fit gronder la révolte et fondre les chaînes des esclaves.

On se souvient qu’Haïti se libéra définitivement le 1er Janvier 1804.

En ce Jour de l’An, comme dans les familles de l’île, Marie-Louise taille donc dans la chair du giraumon, le potiron du pays, découpe de copieux morceaux de viande. Elle fait la soupe au giraumon, dont l’odeur faisait rêver les esclaves et à laquelle jamais ils ne goûtaient.

Au moment de servir, entre chaque louche, Marie-Louise formule ses voeux pour la nouvelle année : de la soupe épaisse pour tous les pauvres d’Haïti, une terre solide et un ciel amical et plein de beaux enfants sur les bancs des écoles avec, dans les yeux, des envies d’inoubliables souvenirs. »

Ce texte, écrit par Alain Serres est tiré de l’album Une cuisine qui sent bon les soupes du monde, édition Rue du Monde

Le Livre

    Une cuisine qui sent bon les soupes du monde

Une-cuisine-qui-sent-bon-les-soupes-du-monde

Alain Serres & Aurélia Fronty

Rue du Monde

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