Losqu’on vous parle de persécutions nazies, à qui pensez-vous ? Aux Juifs, aux Tziganes, aux homosexuels et aux handicapés… mais vous a-t-on parlé des métis ?

Galadio, c’est l’histoire d’un jeune métis, Ulrich Ruden, né dans l’entre-deux-guerres d’une mère allemande et d’un père soudanais, soldat d’occupation des troupes coloniales françaises.

Il assiste avec horreur aux premières persécutions pratiquées par les nazis qui commencent à appliquer les lois raciales de Nuremberg. Amoureux d’une jeune fille juive, Déborah, il voit avec consternation comment cette minorité allemande va être traitée. Lui-même, alors qu’il se vit comme totalement Allemand, va être victime de discriminations et participer à la rafle de 1936 visant à stériliser les milliers de métis « franco-allemands » : ils sont une menace pour la pureté de la race germanique !

Ulrich Ruden découvre alors qu’il a un autre nom, Galadio Diallo, en la mémoire de ce père qu’il n’a jamais connu. C’est là qu’il commence à se mettre en quête de ses origines africaines.

Balloté par l’Histoire, il est enrôlé dans le cinéma colonial allemand. Le pays dirigé par Hitler cherche à montrer par ce nouveau média de propagande la grandeur de son empire.

Là, Ulrich est traité plus comme un sous-homme que comme un figurant, accoutré d’un pagne et de plumes… à l’époque où, en Europe, jusqu’à la Seconde Guerre Mondiale les exhibitions de « sauvages » dans des zoos humains démontrant la suprématie de l’homme blanc sur les autres « races » étaient monnaie courante et remportaient un vif succès !

Comment Ulrich va-t-il pouvoir fuir l’Allemagne nazie ? Quand va-t-il enfin avoir prise sur sa propre vie et commencer a retrouver le Galadio Diallo qui sommeille en lui ? Que va-t-il trouver à son retour à Duisbourg, son village natal, au lendemain de la Guerre ?

Ce récit n’est pas seulement un récit d’aventures. C’est aussi un récit initiatique, celui d’Ulrich qui cherche à découvrir l’histoire de son « prénom secret » que lui a transmis son père. Comme dans une enquête policière, il ne détient que quelques indices pour retrouver la trace de celui-ci.

Galadio est aussi un roman historique qui nous montre la montée du nazisme en Allemagne et qui nous fait revivre l’entre-deux-guerres et la Seconde Guerre Mondiale sous un angle peu connu, différent. Il nous raconte le parcours des tirailleurs africains d’une guerre à l’autre, l’épisode de la « honte noire » (Die Schwarze Schande) en Allemagne lors de l’occupation de la Rhénanie par les troupes françaises en 1921, essentiellement constituée de « noirs » venant des colonies françaises. La propagande nazie fera croire à des exactions massives (dont des viols) des Africains à l’égard de la population. Les Français durent retirer ces troupes suite au scandale. Le Münchner Zeitung (« Le Journal de Munich ») écrivait en mars 1921 :

« C’est un crime envers la civilisation que de faire venir du centre de l’Afrique des nègres arriérés pour surveiller un peuple d’une culture supérieure. Au nom de l’honneur du peuple allemand, la protestation s’amplifie contre la honte qu’on nous impose, et notre appel s’adresse à la conscience de l’univers civilisé. Dans le temps, nous avons essayé de les élever, et maintenant, ils viennent nous garder comme si nous étions des animaux. Nous sommes descendus plus bas que le plus reculé des pays d’Afrique. Nous ne voulons pas dans nos villes et nos campagnes, vivre sous la botte des Gaulois de couleur! »

Les femmes ayant eu une histoire avec un tirailleur seront tondues et mises au ban de la société. Quel sera le sort de la mère d’Ulrich ? La retrouvera-t-il a la fin de la guerre ? Déborah, son amour de toujours, échappera-t-elle aux camps ?

Le style est simple, sobre, clair. Nous ne nous perdons pas dans d’éventuels épanchements du protagoniste ou dans le sentimentalisme. Il règne une grande pudeur chez les personnages.

La documentation est très approfondie, le roman est riche en dates, en évènements historiques précis. L’auteur de Cannibale s’en tient aux faits et laisse à son lecteur la liberté de se façonner un jugement.

A travers ces faits, se dégage une forte dénonciation de la cruauté et de la barbarie des systèmes oppressifs, de la dictature nazie, du racisme et de la discrimination, pendants de la bêtise humaine. L’auteur nous montre comment la propagande nazie peut aussi contaminer ses propres victimes car Ulrich, naïf, veut aussi faire partie de la jeunesse nazie et ne comprend pas pourquoi on le rejette.

Didier Daeninckx a su donner la parole aux exclus et réhabiliter la mémoire des tirailleurs « sénégalais », leur histoire tragique… une histoire très vite effacée, ignorée.

Car c’est le mépris qu’ils ont subi du côté allemand comme du côté français, l’absence de reconnaissance.

Un hommage rendu aux oubliés de l’Histoire,

aux tirailleurs africains, sacrifiés pendant les deux Grandes Guerres,

pour un pays qui les a ignorés,

à leurs descendants de l’autre rive et à leur histoire.

Une introspection sur la condition de métis, la difficulté de concilier

deux cultures, deux identités, le tiraillement.

Une fin prometteuse, chargée d’espoir,

où l’Amour peut régner en maître.

Nous vous invitons à lire l’hommage rendu aux tirailleurs de Léopold Sédar Senghor : « Aux tirailleurs sénégalais morts pour la France, Hosties noires, in Oeuvres poétiques, 1948, éd. du Seuil, 1964

Galadio est un roman que nous recommandons aux enseignants de Lettres pour le niveau de 3ème. La période historique correspond à leur programme d’Histoire. On peut travailler sur la forme du récit, les rythmes narratifs, l’autobiographie fictive et analyser les thèmes comme le racisme, la ségrégation, les exhibitions, la double identité et la Quête de Soi …

Et vous, qu’avez-vous pensé de ce livre ? Votre avis nous intéressent.

Le Livre

    Galadio

Galadio

Didier Daeninckx

Folio

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